mercredi 19 juin 2024

Le temps du bac

 

Pour l'atelier Mil et Une

 

 Photo d'Alastair Magnaldo


 

Allez, Roxane, Diane, Morgane, Louane, Ariane...

Oubliez qu'il fait beau sur la plage de Cannes,

Que le printemps aujourd'hui dans les fleurs se pavane

Alors que les épreuves du bac vous condamnent

A rester enfermées tout le jour penchées sur les arcanes

De sujets qui vous donnent mal au crâne : 

Savoir placer sur la carte Taïwan et la Louisiane,

Tracer d'un trait diamètres et médianes,

Connaître les formules du butane et du méthane,

Philosopher sans passer du coq à l'âne...

 Eviter à tout prix de la mémoire la panne

Trop dur, quand on n'est pas Super(wo)man

Tenir, tenir à coup de cafés, de tisanes,

Relire dix fois les Lettres Persanes

Et puis se dire que cette vie sous cellophane,

Que cette vie de moinesse sans soutane...

Passera comme passe la tramontane

Et que tous les devoirs, toutes les feuilles diaphanes

Bientôt s'envoleront là-haut dans la montagne...

Ou sous le soleil des vacances en Toscane...

.

La Licorne

.


...et Jeu 95... 

(J'ai placé les mots "mémoire(s)", "d'un" , "âne"

et choisi des rimes en rapport.... :-)

 .

 

 

dimanche 16 juin 2024

Le meunier, son fils et l'âne


 


 
Histoire malicieuse de Nasreddine
 
(qui ressemble fort à une fable bien connue)

 J'ai lu dans quelque endroit qu'un Meunier et son Fils
L'un vieillard, l'autre enfant, non pas des plus petits,
Mais garçon de quinze ans, si j'ai bonne mémoire,
Allaient vendre leur Âne un certain jour de foire.


Afin qu'il fût plus frais et de meilleur débit,
On lui lia les pieds, on vous le suspendit ;
Puis cet Homme et son Fils le portent comme un lustre ;

Pauvres gens, idiots, couple ignorant et rustre.
Le premier qui les vit de rire s'éclata.
Quelle farce , dit-il, vont jouer ces gens-là ?
Le plus Âne des trois n'est pas celui qu'on pense.

Le Meunier, à ces mots, connaît son ignorance.
Il met sur pied sa Bête, et la fait détaler.
L'Âne, qui goûtait fort l'autre façon d'aller,
Se plaint en son patois. Le Meunier n'en a cure;
Il fait monter son Fils, il suit : et, d'aventure
Passent trois bons Marchands. Cet objet leur déplut.
Le plus vieux au Garçon s'écria tant qu'il put :
Oh là oh, descendez, que l'on ne vous le dise 
,
Jeune homme qui menez Laquais à barbe grise ;
C'était à vous de suivre, au Vieillard de monter.
Messieurs, dit le Meunier, il vous faut contenter.

L'enfant met pied à terre, et puis le Vieillard monte,
Quand, trois filles passant, l'une dit : C'est grand honte
Qu'il faille voir ainsi clocher ce jeune fils,
Tandis que ce nigaud, comme un évêque assis,
Fait le veau sur son Âne et pense être bien sage.
Il n'est, dit le Meunier, plus de veaux à mon âge.
Passez votre chemin, la Fille, et m'en croyez.
Après maints quolibets coup sur coup renvoyés,
L'Homme crut avoir tort et mit son Fils en croupe.

Au bout de trente pas, une troisième troupe
Trouve encore à gloser. L'un dit : Ces gens sont fous!
Le Baudet n'en peut plus, il mourra sous leurs coups.
Hé quoi, charger ainsi cette pauvre Bourrique !
N'ont-ils point de pitié de leur vieux domestique ?
Sans doute qu'à la foire ils vont vendre sa peau.
Parbieu, dit le Meunier, est bien fou du cerveau
Qui prétend contenter tout le monde et son père.
Essayons toutefois, si par quelque manière
Nous en viendrons à bout. Ils descendent tous deux.

L'Âne, se prélassant, marche seul devant eux.
Un Quidam les rencontre, et dit : Est-ce la mode
Que Baudet aille à l'aise et Meunier s'incommode ?
Qui de l'Âne ou du Maître est fait pour se lasser ?
Je conseille à ces Gens de le faire enchâsser 
.
Ils usent leurs souliers et conservent leur Âne :
Nicolas au rebours ; car quand il va voir Jeanne,
Il monte sur sa bête ; et la chanson le dit. 

Beau trio de Baudets! Le Meunier repartit :
Je suis Âne, il est vrai, j'en conviens, je l'avoue ;
Mais que dorénavant on me blâme, on me loue ;
Qu'on dise quelque chose ou qu'on ne dise rien,
J'en veux faire à ma tête. Il le fit, et fit bien.
  
Quant à vous, suivez Mars, ou l'Amour, ou le Prince ;
Allez, venez, courez ; demeurez en province ;
Prenez femme, abbaye, emploi, gouvernement :
Les gens en parleront, n'en doutez nullement.
 
.
Jean De La Fontaine
.
 
 


 
 
 

mardi 11 juin 2024

JEU 95 : "Les mémoires d'un âne du XIIIème siècle" - Joe Krapov

 

                    LES MÉMOIRES D’UN ÂNE DU XIIIe SIÈCLE

 

Les gens sont formidables ! Les êtres humains acceptent sans ciller que Jolly Jumper, un cheval, joue aux échecs avec Lucky Luke mais ils ont du mal à croire qu’un âne tel que moi puisse écrire ses mémoires et jouer à des jeux d’esprits.

Et pourtant l’histoire de la mule du pape dans les "Lettres de mon moulin" d’Alphonse Daudet leur prouve que nous en avons, de la mémoire, nous les ânes.

Les gens sont formidables et mon maître l’est encore plus que tout le monde. Il s’appelle Nasr Eddin Hodja. Il est né à Akşehir  en Turquie. Il est à la fois sage et fou, parfois bouffon de Tamerlan, parfois cadi  en charge des âmes et de la bonne marche de son village.

Pour ce qui est de la bonne marche de Nasr Eddin, c’est moi qui suis concerné puisque je le porte sur mon dos. Pour vous donner une idée du personnage, sachez qu’il me chevauche toujours à l’envers, le regard tourné vers mon appendice caudal.

Nasr Eddin le précurseur s’en remettait déjà, à son époque du XIIIe siècle, à son GPS et à son véhicule automatique !

 

 

Nasr Eddin Hodja est surtout connu des conteurs et des conteuses – si, si, il en existe encore dans ce monde de youtubeurs et de tiktokeuses ! -. On trouve ses aventures dans des livres de Jean-Louis Maunoury et dans les deux recueils de contes philosophiques de Jean-Claude Carrière intitulés « Le Cercle des menteurs ».

Je voudrais vous faire cadeau aujourd’hui d’un joli âna que j’ai constitué moi-même. C’est le recueil, agrémenté très logiquement d’un accent circonflexe, des devinettes que je posais à mon maître lorsque nous cheminions de village en village pour qu’il apprenne à ses congénères la façon de faire tomber la pluie ou leur fasse part de sa conception du partage de la science.

Je dois avouer, car je suis honnête, que mon maître trouvait toujours la solution. Pour une raison évidente : les véritables sages sont capables de retrouver leur âge mental de huit ans et demie et le goût des calembours qui fusaient dans les cours… de récréation où ils riaient sainement sans la peur d’être envoyés au coin, coiffés d’un bonnet d’âne – sont-ils bêtes, ces éducateurs, de ne pas percevoir notre intelligence ! -.

 

 

Comment appelle-t-on…

(Pour obtenir la solution, positionnez votre souris derrière le point d’interrogation, faites un clic gauche, maintenez enfoncé et faites glisser le curseur vers la droite)

L’âne qui joue du biniou dans un bagad breton ? BIHOUÉ
L’âne japonais belliqueux qui en veut à tout le monde ? IMO ZITÉ
L’âne qui monte sur le dos d’un éléphant pour traverser les Alpes ? IBAL
Le cadichon faiblichon qui manque totalement d’énergie ? ÉMIÉ
L’âne qui, à force de fausses notes, fait foirer l’exécution d’un morceau ou d’un plan ? I CROCHE
L’âne qui se prend pour le dieu de l’humilité et de la normalité ? ODIN
L’âne qui est entouré d’un amas de morceaux de glace et de poussières ? EAU DE SATURNE
L’âne qui vous rend visite tous les ans à la même date ? HIVER-SERRE
L’âne qui écrit dans les marges des cahiers et en bas des pages des livres ? NOTATION
L’âne qui fait une publicité d’enfer ? ONCEUR
L’âne à qui l’on fait porter un anneau ? ULAIRE
L’âne dont on ne connaît pas le nom ? ONYME
L’âne qui fait exception à la règle ? O MALI
L’âne qui frappe d’excommunication ? ATHEME
L’âne qui a de belles formes extérieures ? AH ! TOMMY !
L’âne qui refuse l’autorité et sème le désordre ? ARCHIE
L’âne qui ne sait ni lire ni écrire ? AH LE FAT BETE !
L’âne qui te demande de t’allonger sur son divan puis de les allonger sur son bureau ? ALYSTE
L’âne d’Allemagne de l’Est qui censure les journaux français ? ACH ! STASI !
L’âne dont les oreilles tutoient les nuages ? APURNA
L’âne qui vous endort encore mieux que Marcel Proust ? ESTHÉSIANT, ESTHÉSIQUE OU ESTHÉSISTE
L’âne qu’on apprécie en terrasse à Marseille ? ISETTE
L’âne qui vient de franchir un pas vers l’aristocratie ? OBLI
L’âne qui commence toutes ses phrases de la même façon ? APHORE
L’âne qui dope encore mieux que le shampooing ? ABOLISANT
L’âne qui voudrait bien mais qui ne peut point ? IE CORDY
L’âne de Sancho Pança qui rêve de se baigner dans la Seine à Paris ? HIDALGO
L’âne qui met la patte sur l’Autriche ? SCHLUSS

 

Et comment se nomment les quatre ânes les plus connus de Bretagne (dont l’un est très bruyant et l’autre est une ânesse) ? Divisiau, Ion, Derneau et Esther

 

***

 

Voilà, ce sera tout pour aujourd’hui mais pour être complet et agréable à notre hôtesse je signale qu’on peut trouver ici, sous la plume de M. Roger Lécureux et le trait de M. Le Guen, des aventures de Nasdine Hodja, un personnage dérivé de mon maître, qui s’en prenait plus activement encore aux puissants de son époque. 

 

Bonne relecture, Dame Licorne, et bonne découverte à vous, gens formidables !

 

Joe Krapov

 

 

 

 

samedi 8 juin 2024

JEU 95 : "Et le soleil s'endormit sur l'Adriatique" - Joe Krapov

 

        ET LE SOLEIL S’ENDORMIT SUR L’ADRIATIQUE

 

Participation de Joe Krapov

 

 

Certains de mes congénères n’hésitent pas, lorsqu’ils sont en société, à exhiber un petit talent généralement caché qui leur confère alors une ou deux minutes de gloire ou plutôt de gloriole.

Il y a par exemple ceux qui savent faire bouger leurs oreilles en gardant une expression figée. Ce genre de bêtise a toujours du succès, ne serait-ce qu’auprès des enfants. « Asinus asinum fricat », comme on dit en latin.

Il y a aussi ceux qui entreprennent d’écrire leurs mémoires et vous parlent de leur livre comme d’un bébé à faire naître dans les meilleures conditions : « J’envisage de le faire publier en usant d’un pseudonyme. Pourquoi pas celui d’une comtesse russe par exemple ? Que pense-tu de Sophie-Rose Touchépine ?".

Les plus sportifs d’entre nous voyagent dans les Cévennes en compagnie d’écrivains écossais. Ils pourraient eux aussi raconter leur périple dans un bouquin. Ou dans un film si l’écrivain – on dit autrice, je crois, maintenant – porte le prénom d’Antoinette.

N’en déplaise aux chastes oreille, ma célébrité, moi, je la dois à ma queue.

N’allez pas croire pour autant, au prétexte qu’on m’a baptisé du nom italianisant de Joachim-Raphaël Boronali que je fasse concurrence à Rocco Siffredi, vedette aujourd’hui bien oubliée de films à caractère pornographique.

Autant ce monsieur s’est dispersé maintes fois dans ce que d’aucun appellent , dans ma discipline, « L’Origine du monde », autant on peut dire de mon coup de pinceau qu’il est unique.

C’est là le propre des records du monde, même en peinture. On égale ou on dépasse mais on ne reproduit pas à l’infini. Quoique !

Je ne sais pas combien vaut aujourd’hui sur le marché de l’art mon chef-d’oeuvre « Et le soleil s’endormit sur l’Adriatique ». Si c’est la rareté qui établit le prix d’un tableau, ce doit être cher. Peut-être même mon œuvre unique est-elle entrée dans un musée ? Si c’est le cas, je regrette beaucoup que mes parents ne soient plus de ce monde. Ils auraient été fiers de moi, eux qui disaient toujours en lisant mes bulletins scolaires que j’étais un âne et qu’on ne ne tirerait jamais rien de moi.

 

Signé : Ali « Lolo » Boron

 

 
 
P.S. Pour en savoir plus sur Boronali,
c’est ici.
 
 
 
 

vendredi 7 juin 2024

Un beau jour ou peut-être une nuit

 


 

Un beau jour, ou peut-être une nuit,

Près d'un lac, nous étions endormis

Quand soudain venu de nulle part

Surgit un soleil noir...

Et depuis, sévit le Mal de vivre

La solitude, les insomnies

En plein coeur de la nuit

L'enfant labouré crie

Il crie afin qu'on le délivre

Dis, quand reviendras-tu ?

Dis, me sauveras-tu ?

Ce matin-là,

Là-bas

On a tué l'amour...

On a tué la vie

On a tué l'enfance

On peut dire : 

Moi, j'm'en balance...

Et continuer sa route

Mais la mort rôde :

De vol de nuit

En vol de nuit,

Le Minotaure dévore 

Et la folie se répand

Au Bois de Saint-Amand

A Nantes et puis à Vienne

En attendant que la joie revienne

Plus d'île aux Mimosas

Plus de temps des lilas

Plus de Joyeux Noël

Plus d'oeil qui étincelle

C'est trop tard :

L'Amoureuse de Saint-Lazare

Est partie sans bagages

Pour de très longs voyages

En pays d'amnésie 


https://image.canalblog.com/uap0yQ27D-oQjb2k22dw1BL2iKM=/filters:no_upscale()/image%2F1144836%2F20240528%2Fob_7d92c4_la-bonne-pioche-14.jpg

 

A force de terreur

A force de noirceur

Nous survivons 

A peine

Tais-toi Marseille 

Tais-toi soleil !

A chaque fois c'est pareil

Ils vous parlent d'amour

Mais ils mentent toujours

Devant la triste Joconde 

Y'aura du monde

Et il y aura toi, l'homme,

L'homme en habit rouge

L'homme aux habits de sang

Et les Mignons Enfants

Hurleront leur chagrin

Cracheront leur venin

Sur le Perlimpinpin

 A mourir pour mourir

Autant mourir de rire

Une longue Dame brune

De sa faucille de lune

 Fauche tous les salauds

Elle vend ses mots-gâteaux,

ses vérités-couteaux

Elle chante du bout des lèvres

Elle répète avec fièvre

Une petite cantate

Et ce vivant poème

Cette musique blasphème

Est pour les psychopathes

Pour tous les sociopathes

Pour tous les Ponce Pilate

La Musique de leur fin

Chapeau bas Madame !

 Pour les mots en balade

Pour les folles aubades

La Louve de l'enfance

Est-elle à Marienbad ?

Vit-elle à Göttingen,
 
En Allemagne ou en France ?
 
ça n'a pas d'importance : 
 
Sous le masque qui tremble

Les histoires se ressemblent 

Mais un jour en septembre
 
Ou peut-être en décembre, 
 
 Un matin ou peut-être une nuit,

Se lèveront les enfants endormis

Et venu de nulle part

Surgira l'aigle Espoir...

.

La Licorne

.

 

 

 
 
Pour l'Atelier de Villejean 
 
 
 

À chaque fois - À force de - A mourir pour mourir - À peine - À Saint-Lazare – L’Aigle noir - L’Amoureuse - Attendez que ma joie revienne - Au bois de Saint-Amand - Au coeur de la nuit – Les Boutons dorés - C'est trop tard - Ce matin-là - Chapeau bas – La Dame brune - Dis, quand reviendras-tu ? - Drouot - Du bout des lèvres - Églantine - Elle vendait des p'tits gâteaux - L’Enfant laboureur - Göttingen - L’Homme en habit rouge - Il automne - L’Île aux mimosas – Les Insomnies - J'ai tué l'amour – La Joconde - Joyeux Noël - Là-bas – La Louve - Ma plus belle histoire d'amour - Madame – Le Mal de vivre - Marienbad – Les Mignons – Le Minotaure - Moi je me balance - Mon enfance – La Mort – La Musique - Nantes - Parce que je t'aime - Perlimpinpin - Pierre - Rémusat - Sans bagages - Septembre (quel joli temps) - Si la photo est bonne - Le Soleil noir – La Solitude - Tais-toi Marseille – Le Temps du lilas - Toi l'homme - Toi - Une petite cantate - Vienne - Vivant poème - Vol de nuit - Les Voyages - Y aura du monde


 

 
 
 
 
 

jeudi 6 juin 2024

Boomer-rang

 

 

- Dis, tu t'sens "boomer", toi ?

 - Boum...quoi ?

- "Boomer" ! Tu sais, les jeunes, ils n'ont que ce mot à la bouche. Maintenant, si t'as plus de soixante piges, si t'es né entre 1945 et 1965, ils te traitent de "boomer", et dans leur bouche, c'est pas un compliment...crois-moi ! En gros, ça veut dire que t'es un beauf, un mec ringue, réac, tradi...qui a connu les pattes d'eph, les deudeuches, les yéyés et puis qui a viré bourge...Un mec au gros bide qui a vécu les trente glorieuses, qui a eu toutes les facilités, qui fait la grasse mat' et qui nage dans le fric pendant que les jeunes générations galèrent...

- Ah oui ? Et c'est moi, ça ? Franchement, je ne me reconnais pas. Ado, j'étais habillé en vieux survêt, je mangeais du sauciflard et j'écoutais de la musique sur un minuscule poste de radio acheté en promo ! J'ai travaillé dur pour réussir mes exams (le bac n'était pas "donné" à l'époque), j'étais dans la dèche totale, je travaillais dans un resto dégueu pour payer mes tickets de métro et avec mon vieil imper troué, je faisais peur aux meufs. Tu parles d'une jeunesse dorée !

- Pareil pour moi ! Comme mes parents n'avaient pas les moyens, je cherchais toutes les combines pour manger gratos, je demandais du rab au resto U et j'avais l'air d'un plouc avec mes frusques d'occase. Pas d'appart', bien sûr, juste une chambre de CROUS de 9 mètres carrés...Un miracle que j'aie pu finir la fac  ! Tout ça pour finir avec un petit salaire de prof, à corriger des dissertes tout le week-end et à partir en vacances en bus pendant que les autres prennent l'avion...Non, ce n'est pas moi que tu verras à Saint-Trop ou à Saint-Barth...ça c'est bon pour les vedettes du show-biz, du foot...bref, les potes à Sarko...

- De quoi te plains-tu, mon vieux ? :-)) T'as des réducs dans les musées et les expos...un abonnement au ciné-club du quartier...des loisirs d'intello...gaucho-socialo-anarcho...sans compter ta place réservée dans toutes les manifs ! 

Aïe ! ne me gifle pas, c'était juste de la provoc...j'aime bien te taquiner, vieux frère...Allez, tu me rejoins tout à l'heure à la salle de gym ? ça fera du bien à nos abdos...de vieux boomers !

- Ouais, et après, je te file un rancard au self de la cafète...On n'ira pas chez moi, comme d'hab : mon frigo est vide ! :-)

- D'acc !  A tout' !

 

La Licorne

 

 


D'après la consigne de Joe Krapov

- Atelier d'écriture de Villejean -

qui nous demande cette semaine de cultiver le "parler tronqué"

(autrement dit, en langage plus soutenu, les "apocopes")

 

Liste proposée :

à c’taprèm - à_tout’ - abdo - accro - ado - agreg - agro - amphé - amphi - anar - appart’ - appli – artiche - blaire - aspi - asso - auto ciné - bac - barbeuc - barge – bat’ d’Af - beauf - bédé - bénèf - beur - bide - blanc-cass - blase - blenno - bolcho - Boul’ Mich - bourge - branque - broc - burlingue - caf’_conc’ - cafète - calecif - calva - came - cap - cas_soc’ - casse - Casto - certif - champ - charre - clandé - clim - Club_Med - coeff - colon - combine - comme d’hab - compète - compil - config - congélo - Contrex - convalo -craspec - d’ac - déca - dèche - dégueu - demi-pens’ - dermato - der - deuche - diams – dirlo - facho – gaucho - socialo - disserte - doc - emmerdes - ex - exam - exhibi - expat - expo - fac - faf – Fig Mag - flingue - foot – formid - lerch - fortif - frappe - fric - frigo - frusque - gardave - gogue – grasse mat’ - gratos - gym - gynéco - hallu - hasch - héro - imper - incruste - indic - info - instit - intello - intox - Jèze - keuf - kilo - langues o - lège - mac - macchab – mag - manif - maths - matos - maxi - McDo - météo - métro - meuf - micro - Monop - morfal - Mouffe - nib – nœud pap - Nouvel_Obs - occase – paf - pardeuss - pattes d’èph - pédé - périph - perm - perpète - petit dèj - photo - plouc - pneu - pop - postère - pote - prem - Prisu - prof - prolo - promo - provoc - pull - queude - rab - racho - rade - radio - réac - rédac’chef - redif - rencard - répète - restau - ringue - rital - rom’pol’ - Saint-Barth - Saint-Trop - Samar - Sarko - sauciflard - sax - Sébasto - sécu - Ségo - self - sensass - showbiz - snack - soluce - sous-off - Steph - suppo - surex - surgé - survête - sympa - taxi - télécom - toxico - tradi - travelo - trouduc - vape - variète - Vél_d’hiv - vélo - zèfe



 

mercredi 5 juin 2024

AI et jeu 95 : "Mémoires d'un âne" - La Licorne

 

 

 

Nous étions une bande de petits gars bien ordinaires, tous issus du village de Charlebois, et, ce matin-là, nous passions notre certificat d'études. 

Motivés par les recommandations de nos parents, qui voyaient en ce diplôme le Graal pour une future ascension sociale, alors que, du haut de nos quatorze ans, nous n'y voyions qu'une corvée rébarbative, nous trempions avec application nos plumes dans l'encrier, tandis que l'instituteur, vêtu d'une blouse grise et flanqué d'une moustache de la même nuance, nous dictait lentement le texte suivant : 

" Qui l'eût cru ? Mon voisin, maire du village, et bouilleur de cru, eut, une fois, une cuite mémorable, et sa popularité, aussitôt, décrut. Il faut dire que cet épisode regrettable et regretté, ne fut pas dû à l'excès d'eau-de-vie, mais à sa passion pour le whisky, qu'il buvait sec. La discorde survint entre lui et un personnage haut-placé qui s'offusqua de ses propos déplacés. Cela lui coûta sa place : Lucien Pinard, dit Lulu, ne fut pas réélu. A l'arrivée des perce-neige, il fut remplacé par un jeunot, un blanc-bec qui ne buvait que de l'eau. Le nouveau-venu ne manquait pas de toupet : il diffama  habilement son prédécesseur : on le crut...Peu de temps après, il devint le porte-fenêtre...euh, pardon, le porte-drapeau de la ligue antialcoolique, son prestige s'accrut... et cette réputation lui ouvrit les portes vers...la ...députation." Point final. 

Relisez-vous, jeunes hommes !

Je me relus. La tête entre les mains, je lus et relus l'histoire du pauvre Lulu et je plaçai, au hasard, les traits d'union, les doubles consonnes et les accents sur les "u"... Ma façon d'orthographier la politique locale, manifestement, n'a pas pas plu...car les bancs de l'école, de ce jour, je ne les revis plus.  

J’en suis reconnaissant car je sais maintenant où regarder pour répondre à l’inévitable question : ça va encore durer longtemps ? Dieu merci, le calvaire ne dura pas. Ce matin-là, grâce à Lulu, je reçus une note éliminatoire et ce fut le terme libérateur de mon parcours pédagogique ainsi que celui de mes camarades de Charlebois, qui, eux non plus, dans ce domaine, ne cassaient pas sept pattes à une mouche. 

Cependant, la vie n'est pas exempte de surprises : trente ans plus tard, quand j'eus pris de la bouteille, je devins maire...et bouilleur de cru ! Qui l'eût cru ?  

 

La Licorne

 

 Pour le Jeu 95 

 

 

et pour l'Agenda ironique de juin, 

proposé par Sabrina

 .

 

Il s'agissait de mettre à l’honneur des gens ordinaires, 

leurs tracas, leurs tralalas, leurs tragédies 

un matin de changement ! 


Il fallait également placer les 6 mots suivants

porte-fenêtre / whisky / discorde / toupet /

 perce-neige / bouilleur de cru...

 

 et puis glisser, au début ou à la fin, cette phrase 

« J’en suis reconnaissant.e car je sais maintenant où regarder 

pour répondre à l’inévitable question […] 

ça va encore durer longtemps ? », 

 

et enfin créer une locution introuvable

(à partir d'expressions déjà connues)  !

.

 

 

  
 

dimanche 2 juin 2024

JEU 95 : "L'instituteur est un âne" - AlainX

 

 


 

L'instituteur est un âne, mais en pire.

À la maison lorsque j'étais petit enfant, on ne s'encombrait pas de livres. Au mieux, à Noël, on m'offrait « un Tintin » et je disposais de toute une année pour le lire, le relire et le rerelire jusqu'à le connaître par cœur. J'avais entendu parler de la comtesse de Ségur qui avait écrit sur les petites filles modèles et sur les mémoires d'un âne. Cela ne pouvait être que des livres terribles écrits par une comtesse, c'est-à-dire une personne de Haut Rang chargée de donner la leçon à tout le monde et des conseils de bienséance. Heureusement, on ne m'avait pas obligé à lire de telles terribles leçons de morale.

Les « mémoires d'un âne » ne pouvaient être que les souvenirs d'un pauvre petit garçon comme moi qui avait porté en classe le bonnet d'âne plus souvent qu'à son tour et séjourné la plupart du temps debout mains sur la tête dans un coin de la classe à regarder l'angle du mur. Dans les plus mauvais jours, c'était agenouillé au sol avec une règle métallique sous les genoux qui devenaient de plus en plus douloureux à mesure que le temps s'écoulait trop lentement. Ça ne pouvait donc être qu'un livre terrible à lire et générant des angoisses épouvantables. Pas question d'avoir un tel ouvrage entre les mains !
Je me disais que la comtesse de Ségur aurait dû s'appeler la comtesse de Cédur !

Aujourd'hui je suis vieux et je perds un coin de ma mémoire. Ce coin de salle de classe où j'aurais aimé avoir le courage de foutre la tête en coin à cet instituteur de m....e à l'aide d'une hache au tranchant bien aiguisé. Ça aurait « cognée de bûcheron » et moi je me serais fendu la gueule en riant à gorge déployée.
Mais probablement que mon ange gardien des délices de comtesse a retenu mes gestes et que je me suis contenté de prédire les enfers éternels cet instituteur de m...e !

Adulte, je l'ai croisé un jour dans la rue. Il était à la retraite et j'ai réalisé combien il était petit et minable. Je le dépassais au moins d'une bonne tête. Et dire que ce connard m'avait foutu la trouille quand j'étais môme. Et dire qu'au final je me suis dit que c'était un pervers. Et j'en suis sûr : s'en était un !


 

samedi 1 juin 2024

JEU 95 : "Mémoires d'un âne"

 

Est-ce la faute aux week-ends prolongés,
à la pluie persistante, au moral en berne...?
Le sujet précédent n'a pas trouvé preneur...
et mon "boulanger de Pagnol" 
s'est retrouvé bien seul...
(ce dont il a l'habitude, me direz-vous...)

Je vous confie le sujet suivant dès maintenant,
en espérant qu'il vous parlera davantage...
 
- Atelier d'écriture pour le mois de juin -
 
Pour vous inspirer... ce mois-ci :
 
une image


...et un livre :
 
 
de la Comtesse de Ségur
.
 
 

Vous pouvez , au choix :


- Placer les mots de ce titre dans votre texte


- Faire en sorte que ce titre de livre soit aussi le titre de votre texte

 

- Ou faire référence, tout au long du texte, à l'oeuvre citée


Envoi à undeuxtrois4@orange.fr

avant le 21 juin 2024

.

Chers élèves écrivants, 

C'est le moment de vous montrer créatifs ! 

Allez...allez...à vos copies !

.

La Licorne

.