lundi 20 juin 2022

JEU 77 : "Lecture libre" - La Licorne

 


 

Monsieur Pennac, on a déjà dit bien des choses de votre livre...qui, en son temps, fut abondamment commenté dans toutes les bonnes émissions littéraires. Tout ayant déjà été dit, je n'y ajouterai rien , sinon un petit témoignage personnel...

Je fais partie de ces personnes qu'on n'a jamais dû contraindre à lire...je m'y suis attelée toute seule. Les livres m'ont toujours fascinée. Les mots aussi. Je sentais intuitivement que le champ de l'écrit était fait pour moi et il était hors de question que ce champ reste un mystère. Je l'ai donc "percé" dès que j'ai pu. Comme si c'était une question vitale. Une question existentielle. 

A cinq ans, pendant que mes copines jouaient dans le bac à sable, j'interrogeais ma mère à tout bout de champ : "p et a, ça fait pa ?" , "o et u, ça fait ou ?", "q et u, ça fait k ?". En trois mois, l'affaire était bouclée, je lisais couramment. 

A la rentrée , ma mère, qui n'y était pour rien, subit les foudres de ma maîtresse de CP qui déclara que, premièrement, elle ne savait que faire de moi dans sa classe et que deuxièmement la méthode avec laquelle j'avais appris à lire n'était absolument pas "orthodoxe". Il est vrai que j'avais suivi une progression qui devait tout à ma curiosité et rien à l'Education Nationale, mais le résultat était là : je savais lire. Et plutôt bien.

Que j'y sois parvenue par mes propres moyens irritait grandement cette brave institutrice qui voyait sans doute, par cette anomalie, ses compétences et son savoir-faire remis en cause. Où allait-on si les enfants se mettaient à trouver le chemin du savoir par eux-mêmes ? Le métier en pâtirait .

Sous cette avalanche de remontrances, je compris vite qu'il valait mieux faire "profil bas". Je débutai l'année de CP en cachant le plus possible mes capacités. Pendant les leçons de lecture, je ne levais jamais le doigt, je ne coupais pas mes camarades qui ânonnaient consciencieusement, je me faisais toute petite et invisible. Je pense que si j'avais pu disparaître sous la table, je l'aurais fait. Mes efforts ne suffirent pas, cependant, à calmer l'enseignante, qui, je le sentais bien, ne me pardonnait pas d'avoir court-circuité le parcours habituel...

En janvier, je fus sauvée par une toux persistante et douloureuse qui me cloua au lit. On diagnostiqua une coqueluche. De quinte en quinte, je passai plus d'un mois sans école...puis ce fut le tour de mes  soeurs de s'arracher la gorge...Pour éviter la contagion, on me garda encore un moment à la maison. Quand je revins sur les bancs de l'école, on était fin mars...J'enchaînai avec les vacances de Pâques...et je ne revins  que pour les dernières semaines, qui furent moins pénibles que celles du premier trimestre car je peaufinai les quelques sons complexes qui me posaient encore problème...

A partir du CE1, je lus tout ce qui me tombait sous la main...Je pillai le bibliobus, la bibliothèque de la classe...Trois mois plus tard, grâce à un instituteur heureusement plus éclairé, je passai prématurément au CE2.

Pendant les dix années suivantes, je continuai à lire avec acharnement...et surtout avec passion. La lecture était un besoin, une nécessité. Je me faisais des "listes" de livres à lire...Quand j'aimais un auteur, je lisais tout de lui...et ensuite, je passais à un autre...A dix ans, j'avais terminé le rayon "Comtesse de Ségur", à quinze ans j'avais lu tout Zola et à dix-sept ans, je me passionnais pour Soljenitsyne. 

Parfait, me direz-vous. Ben non, justement.  Outre le fait que cela ne me rapprochait pas des autres, qui eux, lisaient plutôt des policiers ou des romans d'amour...cela ne m'aidait pas non plus pour le travail scolaire.

Habituée à lire "pour mon plaisir", les livres "imposés" me tombaient des mains. 

Alors que  d'habitude, je finissais un livre en moins de trois jours, je mis des mois à lire "Polyeucte"... et je faillis ne jamais arriver au bout de "La condition humaine" de Malraux...Je devais vraiment me "forcer"...je n'y arrivais pas. 

J'avais deux piles sur ma  table: la pile de livres personnels disparaissait en un clin d'oeil...celle des livres "obligatoires" prenait la poussière... Aujourd'hui encore, je garde de ces lectures scolaires des souvenirs  de "tâche insurmontable"...des souvenirs de contrainte et de déplaisir. Paradoxal, quand même, pour quelqu'un dont la lecture était la principale occupation.

Alors, merci, merci , Monsieur Pennac pour votre livre. 

Merci d'avoir rappelé à tous que la lecture est autre chose qu'une contrainte. Merci d'avoir rappelé que c'est avant tout une soif, une aventure, un désir...Car c'est ça, au final,  qui change tout : le DESIR. Sans désir, sans liberté, tout amour vire au dégoût...et l'amour des livres n'y échappe pas.

Si les parents et les enseignants pouvaient s'en souvenir, ce serait merveilleux !

 

La Licorne

 

 


Les droits imprescriptibles du lecteur

  1. Le droit de ne pas lire.
  2. Le droit de sauter des pages.
  3. Le droit de ne pas finir un livre.
  4. Le droit de relire.
  5. Le droit de lire n’importe quoi.
  6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).
  7. Le droit de lire n’importe où.
  8. Le droit de grappiller.
  9. Le droit de lire à haute voix.
  10. Le droit de nous taire.
Daniel Pennac 
"Comme un roman"
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dimanche 19 juin 2022

JEU 77 : "Gogolien" - Joe Krapov

 

GOGOLIEN

 

Filigrane jeu 77 piles de livres

 

- Lardu ? Ouksékté ? C’est Loreille !

- Je suis dans la bibiothèque ! Au guichet !

- De kèk tu fous là-d’sous ? Montre donc ta binette !

- Ch’peux pas ! J’ai une tête monstrueuse ! Y m’est arrivé un truc pas ordinaire !

- Keskecé donc ?

- J’ai pus d’ nez !

- Tu ne sens plus rien ? C’est la Covide ? L’anosmie ?

- Non, mon appendice nasal s’est fait la malle ! Tu sais que j’ai toujours adoré bouquiner ?

- Sûr, c’est pas les livres qui manquent, chez toi !

- Même que mes parents s’en plaignaient toujours : « Çui-là, kès’k’on va n’en faire ? L’est toujours le nez plongé dans ses livres !".

- Mais t’as pas tout raté, Lardu ! T’es quand même devenu bibiothécaire ?

- Oui mais figure-toi qu’hier soir je me suis endormi comme d’habitude, le nez dans mon bouquin. Eh bien ce matin je ne l’ai pas retrouvé !

- Le livre ?

- Non, le nez ! Ni le livre non plus, t’as raison. Alors depuis je retourne toute la bibiothèque pour le retrouver.

- N’en v’là encore d’une drôle d’histoire ! Tu veux-t-y que je t’y aidasse ?

- Je préfère pas. Y’a que moi pour m’y retrouver dans mes piles.

- Tu veux dire dans tes PAL ? Tu veux vraiment pas que je t’épaule ? A défaut de tomber le pull, je peux te suggérer des pistes. T’as regardé dans « Cyrano de Bergerac » d’Edmond Rostand.

-Tu penses bien que c’est par là que j’ai commencé ! En matière de tirade du nez, hein !

- « Le Parfum » de Patrice Süskind ?

- J’ai pas, ça !

- Celui de la dame en noir de Gaston Leroux ?

- Pas trouvé de nez dedans.

- « L’É-nez-ide » de Virgile ?

- Y était pas.

- Les Mémoires du maréchal Ney ?

- Pas plus !

- Celles de Tony Blair ?

- Nothing !

 

Filigrane jeu 77 le nez de Gogol

 

- « Les nez des Ferchaux » de Simenon ?

- L’est au grenier, çui-là.

- « La Perspective Nez-vsky « de Gogol ? Dans une édition achetée sous le manteau ?

- Lui, je l’ai viré à cause de la guerre, avec toute ma collec’ de littérature russe.

- C’est particulièrement con vu que Gogol était ukrainien ! T’as regardé dans tes bandes dessinez ? Peut-être dans Gaston Lagaffe, confisqué par l’agent Longtarin, ton pif ?

- Pif ! Pif ! Pif ! T’es génial, Loreille, je n’ai pas cherché là et pourtant j’en ai lu un hier soir ! Tiens le voilà ! Youpi, il est là, mon nez, dans « Les Aventures de Pif » n° 53 ! Merci, merci, cher ami ! Je te suis infiniment… infiniment… C’est quoi l’adjectif pour exprimer la gratitude ?

- Recon-nez-sant ?

- Oui, c’est ça, reconnaissant !

- Si je peux me permettre un conseil, Lardu…

- Oui ?

- Pour ne plus avoir à chercher ton nez dans les bouquins... investis dans une liseuse !

 

PLC 53 01

 

Joe Krapov

 

 

 

jeudi 2 juin 2022

JEU 77 : "Comme un roman" - Adrienne

 

 


- Mais comment t'as su que j'étais là? s'étonne Nadine.
- Écoute, dit Marie-Paule, c'est vraiment pas difficile! Tu crois que tu te caches mais tu gardes tes mains sur la table...
- Ben oui sinon je tombe, grommelle Nadine en se réinstallant derrière ses piles de livres.

C'est vrai quoi, est-ce que j'ai encore l'âge de me mettre à croupetons!

Et puis d'abord, est-ce que je n'ai pas le droit de lire tranquille? De lire ce que je veux, sans que Marie-Paule me dise un dédaigneux "c'est n'importe quoi!"
De lire où je veux?

Et sans avoir à en faire un rapport commandant!

Non mais!!!

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Adrienne

 

 

mercredi 1 juin 2022

JEU 77 : "Comme un roman"

 

 - Atelier d'écriture pour le mois de juin -

 

Chers ami(e)s écrivant(e)s,
 
Ce mois-ci, je vous propose 
de faire courir votre imagination 
à partir de cette image :
 


 Et de ce titre de livre :
 

 "Comme un roman"

de Daniel Pennac

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Rappel : 

Vous pouvez, au choix :


- Tout simplement, placer les mots de ce titre dans votre texte

(dans l'ordre que vous voulez)

- Ou faire en sorte que ce titre de livre soit aussi le titre de votre texte

(et donc le choisir comme fil conducteur de votre création)

- Ou , troisième et dernière possibilité, 

faire référence, tout au long du texte, à l'oeuvre citée

(en l'imitant, en la résumant, en la complétant, en la détournant...etc)

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Envoi à undeuxtrois4@orange.fr

avant le 21 juin 2022

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La Licorne

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