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mardi 18 janvier 2022

JEU 72 : "Regarde-moi d'où tu es" - Laurence Delis

 



Regarde-moi d’où tu es


Regarde-moi d’où tu es, j’écoute le vent des souvenirs comme une musique lointaine, à peine murmurée à la surface liquide. J’efface la peine à coup de turbulence et d’ardeur. C’est dire que ne pas s’attarder est gage d’avancée car je perds le fil du temps jusqu’à oublier les traces qui me hantent. Regarde-moi d’où tu es, je creuse encore le sable avec mes mains d’enfant pour voir la mer s’étendre à l’horizon. Et si les promesses de demain ne seront jamais figées sur des photos, je te parle. Je te parle sans réserve, tu sais. Il est plus facile de dire l’absence dans le silence qui suit les grands départs, c’est un dialogue complice qui ne mesure pas le temps. Regarde-moi d’où tu es, je traverse l’écume comme le lit des rivières me berce. Les jours passent dissemblables et ma voix en dedans n’a de cesse de te dire les sourires esquissés ; la lumière qui se lève sans toi. Regarde-moi d’où tu es, le littoral se pare toujours d’ocres et de bleus sous les embruns du jour.







dimanche 21 novembre 2021

JEU 70 : "Effacement" - Laurence Delis


 

Consigne ICI

 


 



Elle s’efface



Elle s’efface. Face à la douleur elle s’efface.

Elle s’efface parmi les passants, elle s’efface sans bruit.

Anonyme dans la foule, meurtrie face aux insensibles

elle frôle l’absence, s’évade dans le silence.

Sans guérison, les stigmates invisibles l’absorbent,

la dérobent aux vivants.

On ne parle pas de disparition, mais de retranchement.

Faut-il y voir sa défense, un rempart aux attaques,

à la violence des mots hostiles qui heurtent son âme,

elle s’éloigne, s’habille de brume, se tait,

se tait jusqu’à s’effacer.

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Laurence Delis

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Sculpture de Bruno Catalano
 




samedi 16 octobre 2021

JEU 69 : "On se reconnaîtra" - Laurence Delis


 

 


 



On se reconnaîtra



aux mots interrompus des écrivains de demain

on vivra les saisons sans altération

et à l’ombre des arbres

tous les instants relèveront d’attention

Eloignés de la complexité de la raison

de toutes ces heures brisées par la morsure des jugements

et les querelles sans fin des dominants voraces

on se reconnaîtra dans l’amour simple

de ceux qui aiment cette vie sans heurt

où le temps ne s’érode pas de vains désirs de grandeur

cette lumière secrète de nos infinies heureuses

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Laurence Delis

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mardi 8 juin 2021

JEU 65 : "Avant le premier vol" - Laurence


 Consigne ICI



 



Avant le premier vol
je mesure la distance complice 
à l’assurance de ta patience
et apprivoise le goût simple de l’instant
cette connivence qui étourdit le jour
et nourrit l’entente de la nuit.

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Laurence Delis

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jeudi 15 octobre 2020

JEU 61 : Terre infinie

 
Terre infinie


 

je ne veux pas de maladie
sur la Terre infinie


ma fierté n'est pas refroidie
ni les esprits qui sans bruit
sèment les graines sous la pluie


j’entends la jeune mélodie
vivifier la terre ancienne du peuple maori
et réveiller les sourires assoupis
dans les arbres prospères et le vent épanoui


j’entends le bruit de l’eau qui court
le refrain des galets dans le chant du troubadour


j’entends gronder l’orage lourd
le son de la pluie dans l’éclat du jour
les enfants plonger dans les rivières alentour


l’art est long et le temps est court
pour peindre le monde au pourtour
les oiseaux du ciel et les grandes tours
toute trace d’hommes sur la ligne ample du jour

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Laurence Delis
 
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vendredi 11 septembre 2020

JEU 60 : Une fée chez moi


 
Moi aussi, j’ai une fée chez moi
Elle paresse elle paresse
Et caresse des idées folles
De celles inventées les soirs d’hiver
Une fée filante à l’allure légère
Elle flâne elle flâne

Au fil d’aplomb de la concordance
Et marche dans les airs
Jusqu’à cueillir l’équilibre des étoiles filantes
Je l’entends dans le vent
Dans la faim de vivre qui tiraille ses ailes
Au milieu de l’affluence dans le silence qui flotte sur le port
Je l’entends
Je l’entends
Frôler les vagues perceptibles de nos âmes sensibles
.
 
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lundi 10 février 2020

JEU 54 : Les métamorphoses





La main tremblante, abandonnant sa révolte, 
Pierre frôle Sara.
Il se penche et parle. La regarde.
Les distances faiblissent.
Il lit les espaces entre les lignes,
cette transparence des sens éveillés,
le partage des corps allongés dans l’ombre.
Contre elle, Pierre entre en elle.
Le langage des métamorphoses chasse alors
la désolation et les déserts,
absorbe le limon et la glaise, éloigne les tempêtes.
Attendri, il la revêt de rêves, réinvente les ciels immortels.
La contemple, épris.
Terre franche, tantôt visible, tantôt invisible.
Expressive.
Attisé par les arrondis clairs de la chair,
dans les corps déployés, brassés, associés, gestes animés,
le désir enfle ; il libère la sève.
Le regard ample, il embrasse ses lèvres. 
La regarde.

samedi 18 janvier 2020

JEU 53 : Infinis fragiles








Faut-il atteindre l’indigo
Des jours de pluie
Et la lumière des nuits sans étoiles
Pour parler de mémoire
Ces infinis fragiles
Des hommes qui affrontent le noir
Et se retiennent de tomber
Là où la mer tresse les souvenirs

Comme on s’amarre malgré la rouille
Aux vagues bleues du souffle majeur
J’entends battre en nous
Le bruit sourd
Du manque et de la douleur
 .

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vendredi 5 octobre 2018

JEU 40 : La ligne de tes courbes




La ligne de tes courbes fait de mon coeur
Un monde qui gonfle au vent de ta douceur
Auréole de mon univers, de la trace d’un langage sûr,
Et dans la métamorphose du jour vécu,
C'est aussi le futur de ce que j’ai vu.
Feuilles frémissantes, bordées de rosée,
Roseau, immortelle et chardon parfumés,
Ailes déployées au plus haut de ta lumière,
Bateaux ivres, époux de la mer,
Chasseurs de brume, d’aurore et de sourires en couleurs,
Parfums des naufrages étoilés aux lumières d'aurores
Qui naviguent au cœur de tous les astres,
Comme l’heure s’avance en toute innocence
Le centre de ton corps se déploie aux horizons si purs
Et réinvente les silences heureux de tous nos regards.

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jeudi 19 juillet 2018

JEU 37 : Etats d'âme du jour




 


Aujourd’hui, j’ai décidé d’écrire ce que je ne dis pas. Parce que coucher les mots sur le papier (en l’occurrence dans  ce journal), c’est en quelque sorte mettre en carton des vieilleries, faire le ménage de printemps. Et là je crois que j’en ai besoin.
Je pense souvent à la citation de Virginia Woolf : « La vie est un rêve, c’est le réveil qui nous tue. » Jamais phrase n’a eu autant d’écho en moi que celle-ci depuis que je suis né.

La nuit dernière je n’ai pas beaucoup dormi. J’ai fait un drôle de rêve, enfin drôle n’est pas le mot approprié, mais ce n’était pas un cauchemar non plus, c’était plutôt un souvenir déplaisant. 
Je devais avoir douze ou treize ans et je racontais à des copains de ma classe ce que je voyais la nuit pendant que tout le monde dort. Je ne sais pas pourquoi c’était important de le dire, mais sur le moment, ça l’était. Je crois que je voulais me laisser porter par les mots qui jaillissaient de ma voix, éprouver cette certitude que le monde pouvait être ample. Généreux.
 
Mais tout ce que je saisissais en retour c’était les moqueries des élèves, des trucs bien méchants qui pleuvaient sur moi comme des tempêtes, pour bien me faire comprendre qu’être différent ce n’était pas envisageable. Ça m’a réveillé en sursaut. Après, je n’ai pas réussi à me rendormir. Alors je suis allé dans le salon pour dessiner et surtout écouter la nuit. J’ai crayonné les ombres, les apparences inaccessibles et tout ce que je perçois. 
 
Depuis des années maintenant, pendant la nuit  j’accède à un autre monde. Un monde où les arbres me parlent, ou le vent, la Terre, l’eau me racontent des milliers d’autres existences.
J’éveille la nuit. J’ai un carnet rempli de dessins qui l’atteste. Bien entendu, j’évite de les montrer à ma mère. Déjà qu’elle pique des crises à chaque fois que je lui raconte ce qui se passe la nuit. Ce matin elle a crié après moi, elle disait : Arrête de suite, arrête, tu m’entends ? C’est pas la vie, ça, c’est pas la réalité ! Si tu continues, on va penser que t’es fou, c’est ça que tu veux ? Finir à l’asile ? Entouré de blouses blanches ?
 

Ça me fait de la peine de la voir ainsi, coupée de tout, coupée de moi, toujours à craindre le regard et le jugement cruel des voisins, des collègues, de la foule autour d’elle. (Surtout depuis que papa est parti). Y a que Julie, qui ne se formalise de rien, qui me soutient même si elle ne le dit pas. Tous les deux, on se comprend au-delà des mots. C’est ça aussi être jumeaux. Différents et semblables dans le même temps depuis dix-sept ans. Si moi je ne bouge presque pas, elle, elle est toujours en mouvement, (elle vise le prochain championnat de gymnastique artistique) son corps toujours en balance, elle tangue comme le vent, puis elle s’élève avec grâce, elle s’envole… et moi je m’ancre dans le sol, je tente de ne pas soulever le moindre grain (de folie ?)

Aujourd’hui, donc, je pense que me taire c’est bien aussi. Je réfléchis différemment. J’entrevois de nouveaux possibles. Et j’ai compris qu’il me faut attendre. Dans ce monde, on n’est pas prêt à s’ouvrir à d’autres univers. Même si les brèches sont de plus en plus évidentes.
 
Alors je crois que j’ai trouvé une solution. Voilà, je vais commencer par écrire un roman. Et peut-être que d’autres histoires suivront. J’en ai des tas à raconter. Ce ne sont pas vraiment des histoires, enfin si bien sûr, même si je ne fais qu’écouter et raconter avec mes mots l’univers qui aspire notre temps d’ici et ouvre des portes ailleurs.
Après tout, d’autres l’ont déjà fait avant moi.
 






dimanche 11 février 2018

JEU 33 : Né pour courir




Eté 2118. Nous vivons sous terre, dans des espaces semblables à des villages. On y trouve des parvis, des maisons, des boutiques, des restaurants, des rues où circulent piétons et cyclistes. Des hommes, des femmes, des enfants y construisent notre présent depuis trois générations.  C’est un jour de l’été et dans le silence d’avant le départ, je respire encore l’air du dedans. Sur l’esplanade, la foule afflue et chaque année le nombre de personnes croît. Dans cinquante et une secondes le compte à rebours sera lancé. Je vérifie mes capteurs. Un signe du maître de la tour me confirme qu’ils fonctionnent. Je ferme les yeux et pendant un instant, l’ambiance est au recueillement. Le regard de la foule est braqué sur moi. Les pulsations de mon cœur tambourinent comme un avant-goût de ce que je vais réaliser aujourd’hui. Je ne dois pas rater le départ.

Le mouvement qui suit celui-ci est semblable à une vague qui déferle en gage de soutien. Les mains frappent les tambours, la foule en liesse ne forme plus qu’un avec moi. Je suis né pour courir. Alors je m’élance. Des foulées qui martèlent le sol et projette du sable et des cailloux autour de moi. Je puise dans mes muscles la propulsion qui m’entraîne loin, au-delà des entrailles de la terre. C’est un jour sans nuage. Le soleil éclaire le ciel de Tolosa. À l’horizon, les Pyrénées s’imposent. Leur présence et la beauté qui émanent d’elles me coupe un instant le souffle.  La nature a repris ses droits. Luxuriance et  profusion s’affichent partout, même si, de-ci, delà quelques bâtisses persistent. Sur les écrans de télétransmission la population suit l’évolution de ma course. Je connais le sentiment qui les anime. Ce désir d’être mes yeux dans le monde d’aujourd’hui. Mon regard capte ce qui m’entoure, détaille les arbres, les collines, l’éclat des boutons d’or dans les prairies, les fleurs des pissenlits dans le vent, le bruissement des cours d’eau.  La lumière qui joue entre les branches des arbres, l’ombre des peupliers. Le vol des oiseaux dans le ciel. Toute quintessence.

Mon souffle est à la mesure de ma mission. Je cours et, une à une, mes foulées s’imprègnent de l’atmosphère. Je suis né pour courir. Loin et vite.  Là, où personne ne va plus. Je cours pour raconter les couleurs. Le monde extérieur. J’emmène mon peuple en voyage. Dans la vibration de mes pas sur la terre, dans l’air qu’aspirent mes poumons, dans mes mains qui cueille un fruit,  sur mes lèvres qui le goûte, dans mes yeux qui parcourent les ondulations du monde. Je suis semblable à un artiste-peintre dont l’œuvre universelle réconcilie la terre et les hommes et peu importe si les radiations brûlent aussi mes cellules, si mon existence est à l’image d’un éphémère. Je suis né pour vivre le monde.




 

vendredi 2 février 2018

JEU 33 : J'attends le moment où...

 
 
 
Année 2118.On ne parle plus de saisons depuis longtemps. Il pleut. Le jour. La nuit. Quelquefois, des espaces entre les nuages laissent apparaître une éclaircie qui redresse nos corps et nous fait lever les yeux. Le reste du temps la grisaille est partout. Certains jours, l’humidité de l’air se mêle aux bourrasques de vent.  Les arbres se balancent, les bateaux tanguent, les maisons sur pilotis, aussi. Le reste du temps le climat ne varie pas. Les pluies rythment la monotonie du temps.

Je me souviens quand j’étais môme, avec les enfants du quartier, on inventait des jeux : danse de la pluie sous les cascades, sauts par-dessus les rus qui sinuent tout autour de la ville, courses à fleur des méandres,  plongeons dans les ravines et bien sûr sauter dans les flaques qui stagnent sur les toits-terrasses. C’était notre jeu de prédilection. On s’imaginait alors le monde d'avant. Chaque flaque pouvait nous mener de l’autre côté de la terre, là où il ne pleut jamais. On rêvait le monde d’avant, quand le soleil nourrissait la terre de sa lumière. Depuis, il paraît que là bas, le soleil brûle autant que le feu, mais personne n’en sait rien, personne n’a été voir, tout du moins personne n’en est jamais revenu depuis l’expédition de 2058. À cette époque le danger avait déjà bouleversé le monde. Les trois quarts de la population, la majorité de la flore et de la faune avaient péri. Le climat oscillait entre chaos et extinction. À présent, il pleut.

Moi, je suis né en 2102, le soleil je ne l’ai jamais vu, ni jamais senti effleurer ma peau.  Maintenant que j’ai grandi, je ne saute plus dans les flaques. Il faut bien bosser. On n’est pas si nombreux à pouvoir le faire. Consolider les fondations des habitations, construire, ériger la cité au-dessus de l’eau. Alors de temps à autre, sur le chemin qui mène au chantier de la ville, je m’arrête et je regarde les mômes sur les toits-terrasse. Et j’attends. J’attends le moment où ils sauteront dans les flaques. J’écoute leurs éclats de rire. Ce n’est pas le soleil, bien sûr mais ça colore et réchauffe quand même la Terre et le cœur des Hommes.
 
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mercredi 15 novembre 2017

JEU 30 : Un monsieur prend l'autobus





Un monsieur prend l’autobus après avoir acheté le journal
et l’avoir mis sous son bras. 
Il a aussi acheté un croissant à la boulangerie,
celle qui se trouve  à l’angle de la rue Deschamps. 
Dans le bus, il hésite à manger son croissant.
Il est encore chaud dans le sachet 
et l’arôme qui s’en échappe ne laisse pas indifférente
la gamine qui se trouve à côté de lui.


Il devine son regard gourmand revenir régulièrement vers lui. 
Il pourrait lui proposer le journal,
juste pour voir la moue qu’elle ferait 
— mécontente ? Agacée ? Tragique ? — 
Peut-être le déchirerait-elle avec rage comme ces gosses capricieux
qu’il croise en faisant ses courses.
Quoique elle semble un peu vieille pour un caprice de la sorte
— treize ou quatorze ans, estime-t-il —, 
mais bon, de nos jours allez savoir comment réagissent les jeunes. 

Une demi-heure plus tard, il descend avec le même journal sous le bras.  
Mais ce n’est plus le même journal, c’est maintenant un tas de feuilles imprimées, 
un tas de feuilles dont la dérive des mots filent vers d’autres lieux, 
des lieux qui disparaissent à leur tour, s’abandonnent au vent, 
il n’en faut pas davantage pour que, une fois sa lecture terminée
ce monsieur abandonne à son tour 
le tas de feuilles imprimées sur un banc de la place.

A peine est-il seul sur le banc que le tas de feuilles imprimées redevient un journal, 
comme pour justifier les nouvelles du jour qui s’affichent à la une, 
pour justifier aussi son usage, le journal attend sur ce banc de la place 
où les passants se pressent vers d’autres lieux, 
jusqu’à ce qu’une vieille femme le trouve, le lise et le repose, 
transformé en un tas de feuilles imprimées.

Elle se ravise et l’emporte et, chemin faisant,
elle s’en sert pour envelopper un demi-kilo de blettes, 
qu’elle vient d’acheter chez le primeur, c’est toujours utile les vieux journaux, 
ça se recycle presque à l’infini, c’est aussi ce que pense la gamine qui le dérobe 
sur la table de la cuisine de sa grand-mère,
laissant choir les blettes sur la table cirée. 
« Un journal qui voyage », c’est le sujet d’étude pour son cours d’art. 
La gamine est contente d’avoir de la matière première à sa disposition. 

Un peu plus tôt dans la matinée,
elle a bien tenté de subtiliser le journal du monsieur dans le bus 
mais il paraissait sur ses gardes — il tenait fermement son journal sous le bras 
et tout autant son sachet contenant un croissant, dans sa main. 
Sans doute ne l’avait-il pas encore lu,
elle s’était dit qu’il voulait peut-être manger son croissant 
en lisant le journal, elle l’avait alors imaginé savourer la viennoiserie
en tournant les pages du journal, 
et pensé que finalement c’était mieux de le lui laisser.



Le journal maintenant prend enfin la dimension qui lui convient, 
la gamine use de ses ciseaux dans tous les sens avec dextérité 
et transforme une dernière fois les pages imprimées. 
Au bout de ses doigts, dans le mouvement des ciseaux,
elle crée une multitude d’oiseaux, 
ceux qui partent à l’autre bout du monde quand change la saison. 
Comme les mots, se dit-elle, ils voyagent loin. 
C’est ce à quoi servent tous les journaux 
après avoir subi ces excitantes métamorphoses.
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