...ça faisait des heures
Que Marc-Alain, indécis,
attendait...
Ce qu'il attendait ?
Il n'en savait rien...
"J'attends de savoir
Ce qu'il faut attendre..."
Disait-il aux passants
Qui l'interrogeaient..
.
...ça faisait des mois
Que Pam, la secrète, attendait...
Ce qu'elle attendait ?
Elle n'en disait rien !
"J'attends de trouver
Celui qui m'attend..."
Pensait-elle souvent
Quand elle s'endormait
...ça faisait des années
Que les deux écrivains en herbe,
attendaient...
Ce qu'ils attendaient ?
Ils n'en savaient rien...
"On attend de trouver
Le temps d'y réfléchir..."
Disaient-il aux lecteurs
Qui s'impatientaient...
...ça faisait des lustres
Que Dieu, le Très-Haut,
attendait...
Ce qu'il attendait ?
Il le concevait bien...
"J'attends que l'homme
Cesse de m'attendre !"
Disait-il à ceux
Qui le révéraient...
...ça faisait des millénaires
Que l'Univers, éternel,
attendait...
Ce qu'il attendait ?
Il le savait bien...
"J'attends le début
De la fin du temps..."
Disait-il à ceux
Qui le contemplaient
...ça faisait un quart d'heure
Que tu m'attendais,
sur ce fichu quai...
Ce qui t'attendait ?
Cache tes joues rouge écrevisse !
.
La Licorne
.
Consigne de Carnets paresseux, alias Dodo :
Il s'agissait de raconter une histoire de premier jour...
en hommage à James Ussher, archevêque d’Armagh et Primat d’Irlande, qui, après de très savants calculs – avant qu’on se moque de lui, rappelons que Kepler et Newton ont tenté la même opération – assigna au premier jour de la Création du monde la date du 22 octobre*.
Donc, une histoire de premier jour, de génèse, de commencement, bref, de début,
avec en plus , si possible, une écrevisse
et , obligatoirement, - deux vers empruntés à l’ami Norge , au choix entre ces quatre là :
« la porte était lourde / ça faisait des heures » ou « j’attends de savoir / ce qu’il faut attendre »
Il fallait s'inspirer de la photo proposée et placer les mots du titre suivant :
"La vie secrète des écrivains"
.
Le temps, cet assassin, le temps nous est compté. Il nous catapulte dans des dimensions cosmiques incompréhensibles. Il nous échappe. Il se tortille comme un multivers, une guimauve interstellaire et métaphysique glissant entre nos doigts comme du vif-argent. Comment expliquer autrement, monsieur le Juge, ce sentiment étrange que les heures ne font plus leurs soixante minutes règlementaires ? Que tout s'accélère au point que même les jeunes, oui monsieur le Président, même les jeunes disent : « Le temps passe trop vite ! » Cette sorte de phrase était jusqu'ici réservée au personnes « d'un âge », joli euphémisme pour ne pas dire « les vieux ». Les croûtons, les has-been, les anciens qui ronchonnent que tout fout le camp et que c'était mieux avant. Oui, même les jeunes déplorent la fuite du temps...
Comment expliquer qu'il fut
un temps (oui, un autre) où j'avais le temps (encore) d'écrire, et
même parfois chaque jour, un billet foisonnant, un atelier d'écriture,
un poème, un récit, une fantaisie, un mémoire, un reportage, alors que
je consacrai le plus clair de mon temps (oui, toujours lui) à barrer un
bateau énorme, et à faire entrer dans de petites têtes multicolores
l'accord du participe et la règle de trois ? Et accessoirement à élever
trois de ces charmants petits êtres, ce qui est, vous en conviendrez,
une activité à plein...temps ?
Ah, monsieur le juge, il y a là-dedans un mystère aussi épais qu'une grammaire chinoise. Ou que la muraille du même nom.
Et
le pire, c'est qu'à chaque minute paisible, délicieuse ou haletante
qu'il m'est donné de vivre aujourd'hui, j'ai le titre d'un billet qui
apparaît en filigrane. Je me vois déjà vous partager, avec cet élan que
vous aimez chez moi, ce concert, cette exposition, cet enthousiasme,
cette indignation, cette promenade, ce paysage beau à couper la chique,
ou simplement un moment philosophique passé à tisser le monde de
nouveaux fils...
Et puis la journée passe, et le soir, j'ai en tête
un feu d'artifice d'idées, d'images, de couleurs, qui explosent en tous
sens, et pas un seul instant pour remplir ma page blanche. Parce qu'au
moment précis où je pourrais caresser ce clavier tant aimé, il y a
toujours un clair de lune, une ombre de chêne bleue sur le gazon, le
frôlement furtif d'un hibou ou d'un chevreuil, un piano qui me tend les
bras, des amis qui passent à l'improviste, un vin à goûter, un enfant à
câliner ou une branche de saule à couper, qui viennent me rappeler
qu'écrire, c'est bien, mais que vivre c'est mieux.
Prenons Balzac.
La Camarde l'ayant fauché à l'âge canonique de 51 ans, il a, au mieux,
même en commençant très tôt, disons à seize ans, consacré trente-cinq
ans de sa vie à noircir du papier. Si l'on compte que la Comédie
Humaine, pour ne parler que d'elle, comporte quatre vingt dix romans de
quelques centaines de pages, à une époque où l'on n'avait que l'encre,
la plume et le papier...Si l'on rajoute les cent Contes drolatiques, et
les vingt-cinq oeuvres inachevées, c'est colossal.
Pas de touche
"delete", pas de copier-coller, pas de clavier. La conclusion est facile
à tirer : Balzac ne faisait que ça du matin au soir. Et parfois du soir
au matin. A raison d'un roman tous les trois mois. J'appellerais plutôt
cela la Comédie Surhumaine.
Non, pour moi, c'est certain : le
Temps devait durer beaucoup plus longtemps au XIX siècle. Ou alors
Balzac, ce prétendu bon vivant, amateur de femmes et de bonne chère,
n'est qu'un affreux mystificateur qui n'a en réalité pas vraiment vécu,
consacrant parfois jusqu'à vingt heures par jour à ce despotisme de
l'écriture névralgique qu'il s'infligea à lui même.
Quelque part, tiens, ça me console de n'être pas Balzac.
Pour le 101ème "Devoir du lundi"
Ce fut un chagrin désordonné...Un chagrin insondable et imprévisible...qui la submergea en quelques mois...D'un coup, le monde dans lequel elle vivait bascula dans l'insensé. Elle vit les gens autour d'elles s'enfoncer peu à peu. Happés par le flot tumultueux des événements, ils se débattirent un instant, avant de renoncer.
Elle les vit, un à un, se noyer dans les méandres d'une histoire fictive. De loin en loin, on apercevait une tête qui surnageait...un individu esseulé qui résistait comme il le pouvait, agrippé aux branches d'une raison vacillante...Les "victimes" se comptaient par centaines, le fleuve du temps charriait leurs corps et les rejetait sur les rives de l'absurde. Spectacle insoutenable. Douleur infinie.
Amitiés, amours...tout se délita. La foi en l'avenir vacilla.
Et puis, un jour, l'espoir changea de camp, le combat changea d'âme. La fatigue du non-sens avait fait son oeuvre. Les esprits usés aspiraient au renouveau.
Elle sortit de chez elle et regarda les arbres. Le petit jour brillait doucement. La pureté de la vérité recouvrait les trottoirs et illuminait la ville d'une lueur d'aurore. Elle oublia ses larmes, elle oublia la peur et la solitude. Dans le silence ouaté, elle ouvrit son manteau et marcha droit devant elle...Au fond du parc désert, une silhouette... Lui ? Ici ? Son coeur bondit.
Qu'importent les événements du monde. Tout était là, au final. Le centre du combat, point obscur où tressaille la mêlée, effroyable et vivante broussaille, c'était son coeur, son centre. Elle se souvint : c'est là que tout se perd, c'est là que tout se gagne. C'est là que tout se construit, ou se déconstruit. A l'intérieur.
La Licorne
Il était une fois, il y a bien longtemps, juste après ce qu’on a appelé «la fin du monde», une princesse qui avait survécu - au cataclysme - au cataplasme - à la catastrophe. *
Elle s’appelait - Punkette replète – Broque et pébroque – Paulette Rondelette *
Elle habitait un pays appelé - la Suisse – le petit suisse – le Sussex * qui était resté - neutre – neutron – feutrine * pendant les hostilités mais s’était quand même pris - une bombe A– un bombyx – une bombarde * sur le coin du - museau – Musso – Placid et Muzo *.
La Suisse est un pays plein de - montagnes – de montagnettes – de montures de lunettes *.
En ces temps - post-apocalytiques – post appeau-catalytique - pause tape-eucalyptus *, il continuait de pousser, le long de ses jolies routes - des arbres à plaques de chocolat - des arbres à came – des dames aux camélias *.
La princesse était peut-être désormais - la dernière habitante du monde – la dernière abonnée du journal « Le Monde » - la dernière habitude de revenir un peu ronde * - des cocktails d’ambassade – des coqueluches de temps maussade – des coquecigrues d’embrassades * sur le - museau – Musso – Placid et Muzo *.
***
Un jour qu’elle s’en allait cueillir du chocolat, - Punkette replette – Broque et pébroque – Paulette rondelette * entendit - une voix douce – une voie d’eau – une voie royale – qui - l’interpellait – qui l’interpolait – qui l’enterre soupe au lait *.
- Hep ! - Mademoiselle – Mademoisissure – Madame oiseuse *!
Elle ne voyait - personne – persane – perspicace * mais la voix reprenait :
- Hep ! - Jolie princesse – jauni pince-fesses – Johnny rince-nièce * !
Cela venait de - dessous un buisson – de dessous le boisseau – de très soûles boit-sans-soif *.
Elle écarta - les feuilles – les deuils – les oeils * et découvrit un vieux - bouquin – bouquetin – bouc teint *.
En agitant - ses pages – ses plages – ses aréopages *– il - s’énervait – s’énervurait – ses nervis raturait *.
- Enfin, vous daignez - m’écouter brouillonne – me brailler les coudes – me brouiller l’écoute * !
- Quelle mutation - bizarroïde – polaroïde – hémorrhoïde * est-ce donc là ? demanda-t-elle. Vous êtes un livre et vous – parlez – partez - pardonnez * ?
- Je suis le livre du Grand Tout. - Je sais tout - je sèche tout - je sexe tout * sur la vie - secrète – secrétaire – Saint-Nectaire – nain sectaire * des écrivains.
- Oh moi, vous savez, lui répondit - Punkette replète – Broque et pébroque – Paulette Rondelette *, - la littérature- la laitue ratée - la ruralité tue *, je lui ai toujours préféré une bonne série sur - Netflix – Netfisc – Netflic * !
- C’est pourtant bien un - écrivain – écriteau – échevin * que vous devez aller trouver si vous voulez que la planète soit - repeuplée – roploplo – heureux peuplier *!
- Il reste donc d’autres personnes que moi-même sur la - planète – panière – pas nette *?
- Oui mais il faut vous - dépêcher – dépêtrer – Depléchin *. L’écrivain est – désespéré - désexpertisé - des esplanadé *. Il ne sait pas que vous existez et que la vie peut – recommencer – recommander - recommenter *.
- Où est-il ? - Où perche-t-il ? - Où persil ? *
- Il habite dans - une île - une presqu’île - un exil *. On ne peut y aller qu’- en avion -en aviron - en amidon *.
- Ca tombe bien, en Suisse on a l’habitude de monter des cols durs et il m’en reste un paquet à la maison.
- De quoi donc ?
- De l’amidon - de l’ami doux - de l’âpre mildiou*. Vous avez le GPS – incorporé - un porc goret - encore paumé * dans votre - avion – aviron – amidon *?
Le - bouquin – bouquetin - Louboutin * se mit à tripler de - volume – volute – vol UTA -volupté * et il ressemblait maintenant à un joli tapis volant ne manquant pas de - caractère – phylactère – Natacha hôtesse de l’air *.
- Installez-vous - dans la rainure – dans la nervure – dans la rainette *.
***
En fait d’île, c’était - l’Angleterre – l’angle obtus – le triangle des Bermudes * dans lequel le temps du voyage disparaît. Le livre la déposa sous l’horloge de - Big Ben – Big brother – Bygmalion * dont il ne restait plus que la moitié.
- Il est où, - l’écrivain – l’écrivant – l’écrivaillon * qui va me - repeupler – repalper - repieuter * le monde pour assurer - le futur – le futé – le futile * ?
- Je suis là, dit un gros crapaud vert et - pustuleux – postulant – pestilentiel * qui se mit à grossir jusqu’à avoir taille - humaine – humide – humoresque *. Embrassez-moi sur le - museau – Musso – Placid et Muzo * et je me transformerai en prince - charmant – charmille -char d’assaut *.
- Hé ho ! protesta - Punkette replète – Broque et pébroque – Paulette Rondelette *. Je ne mange pas de ce - pain-là – tapin-là – topinambour-là *!
- Comment ? s’offusqua le livre du Grand Tout. Vous ne voulez pas redonner apparence humaine à - Guillaume – Guilledou – Gui l’an neuf * ?
- Non ! Et elle tourna - l’étalon – le hongre – la jument *.
***
- C’est la dernière fois que j’utilise une Suissesse comme personnage d’un de mes romans ! La vie n’est décidément pas un conte de - fées – méfaits – contrefaits *, se jura l’auteur du best-seller en inscrivant le mot « Fin » au bas de son - parchemin – porcherie - percheron *.
* Rayez la mention inutile !
Illustrations empruntées à Maïck conteuse
.
Pour le 100ème "Devoir du lundi"
Flamme rouge dans le brouillard
Eliane s'en va droit devant elle :
Masquer ses larmes sous la pluie
Marcher pour oublier...
Et tenir bon dans la tempête...
Au début d'un automne maudit
Un décret sans âme l'a terrassée...
Petit chaperon rouge
A été dévoré par le grand méchant Loup
Ricanant de toutes ses dents
A l'idée de mettre à la rue
Pratiquement du jour au lendemain
Les gens qui soignent, les gens qui aident...
Uniquement parce qu'ils ont dit NON.
Il n'y a plus rien à faire maintenant
Eliane se perd dans la forêt de ses pensées
Rien ne la retient plus dans ce monde insensé
Oh, la vie sera si belle
Une fois la folie passée...
Garder sa force, sa dignité
Et renaître...oui, renaître à la mort du Loup.
La Licorne
La vie secrèt' des écrivains
par kyrielles, dans tous ses plis
plis aux scènes des rachidiens
pliques sièges de maladies...
Sans prendre ombrage des cris vains
(gargarismes de malappris)
invective ou aboi de chiens
n'inquiètent en rien ses écrits
Du cri primal au souffle éteint
du caillou jusqu'à la fourmi
elle inspire cet écrivain
qui sommeille en nos appétits
Inquiet
de la réaction de M. Radpoil, l'élève debout sur l'estrade plonge son
regard dans les entrelacs de ses chaussures boueuses. C'est qu'à
présent, il aimerait autant ne pas avoir à affronter le regard de ses
camarades de classe. D'autant que le silence se fait pesant, tandis que
M. Radpoil relit le texte de son cru dont il tient la copie en main et
sous le feu trouble de ses demi-lunes.
"- Fort bien. Fort bien,
déclare enfin le vieil enseignant avec un enthousiasme aussi modéré que
sentencieux. Le sujet est respecté en tout point, sur le fond, du moins.
Mais, pour ce qui relève de la forme, je vous avais expressément fait
commande d'un acrostiche. Or, il ne m'apparaît pas que cela soit le cas.
Pouvez-vous m'en donner une explication, élève Buisson ?"
Le lycéen, sans lever le nez, obtempère et dit en manière d'explication :
"-
Ben, c'est bien un acrostiche, monsieur, ose affirmer l'élève Buisson,
masquant sa bravade sous son air contrit. Il se lit à l'initiale de
chaque strophe, monsieur."
L'enseignant, connu pour sa passion
rigoriste à l'égard de la langue de Molière, baisse à nouveau les yeux
sur la copie du jeune homme, puis s'étonne :
"- Vous dites ?... Attendez... La-Sans-Du ? Pardon, mais c'est particulièrement abscons, élève Buisson.
"-
Pas le premier mot, monsieur, la première lettre; l'initiale, quoi,
fait remarquer sur le même ton, l'effronté qui jubile intérieurement."
" - L-S-D... L-S-D... Non, je ne vois pas."
La plupart de la classe ne peut alors contenir un soudain gloussement moqueur.
Mais M. Radpoil de poursuivre, interloqué, comme entré en lui-même :
"- Non, je ne vois pas... Toujours pas... 'Comprends pas..."
Sauvé
par le gong, l'élève Buisson quitte l'estrade. Tandis que le vieil
enseignant rappelle à la ronde les consignes pour le prochain cours, le
lycéen attrape ses affaires de classe et se joint à ses camarades, pour
profiter avec eux d'un bon quart de récréation, dans la cour battue par
les vents de l'automne.
Il se retrouve bientôt, flanqué de ses trois collègues favoris, sous l'horloge rivée à l'angle du bâtiment de l'intendance.
"- On est d'accord, les gars ? C'est ce soir qu'on lui fend la gueule à cette satanée horloge..."
Le
groupe acquiesce d'un air entendu, avant de passer les grilles du lycée
pour regagner leur quartier caennais, d'entre tous leur favori : la
Demi-Lune.
- Atelier d'écriture pour le mois d'octobre -
Vous vous inspirerez bien sûr de l'image
pour créer un texte de votre cru...
.
Concernant le titre de livre ,
vous pouvez , au choix :
- Tout simplement, placer les mots de ce titre dans votre texte
(dans l'ordre que vous voulez)
- Ou faire en sorte que ce titre de livre soit aussi le titre de votre texte
(et donc le choisir comme fil conducteur de votre création)
- Ou , troisième et dernière possibilité,
faire référence, tout au long du texte, à l'oeuvre citée
(en l'imitant, en la complétant, en la citant, en la détournant...etc)
.
Envoi à undeuxtrois4@orange.fr
avant le 21 octobre 2021
(la date du mail faisant foi ;-)
.
Je vous souhaite une belle inspiration...
et un beau mois d'octobre...
.
La Licorne