L'instituteur est un âne, mais en pire.
À
la maison lorsque j'étais petit enfant, on ne s'encombrait pas de
livres. Au mieux, à Noël, on m'offrait « un Tintin » et je disposais de
toute une année pour le lire, le relire et le rerelire jusqu'à le
connaître par cœur. J'avais entendu parler de la comtesse de Ségur qui
avait écrit sur les petites filles modèles et sur les mémoires d'un âne.
Cela ne pouvait être que des livres terribles écrits par une comtesse,
c'est-à-dire une personne de Haut Rang chargée de donner la leçon à tout
le monde et des conseils de bienséance. Heureusement, on ne m'avait pas
obligé à lire de telles terribles leçons de morale.
Les «
mémoires d'un âne » ne pouvaient être que les souvenirs d'un pauvre
petit garçon comme moi qui avait porté en classe le bonnet d'âne plus
souvent qu'à son tour et séjourné la plupart du temps debout mains sur
la tête dans un coin de la classe à regarder l'angle du mur. Dans les
plus mauvais jours, c'était agenouillé au sol avec une règle métallique
sous les genoux qui devenaient de plus en plus douloureux à mesure que
le temps s'écoulait trop lentement. Ça ne pouvait donc être qu'un livre
terrible à lire et générant des angoisses épouvantables. Pas question
d'avoir un tel ouvrage entre les mains !
Je me disais que la comtesse de Ségur aurait dû s'appeler la comtesse de Cédur !
Aujourd'hui
je suis vieux et je perds un coin de ma mémoire. Ce coin de salle de
classe où j'aurais aimé avoir le courage de foutre la tête en coin à cet
instituteur de m....e à l'aide d'une hache au tranchant bien aiguisé.
Ça aurait « cognée de bûcheron » et moi je me serais fendu la gueule en
riant à gorge déployée.
Mais probablement que mon ange gardien des
délices de comtesse a retenu mes gestes et que je me suis contenté de
prédire les enfers éternels cet instituteur de m...e !
Adulte, je
l'ai croisé un jour dans la rue. Il était à la retraite et j'ai réalisé
combien il était petit et minable. Je le dépassais au moins d'une bonne
tête. Et dire que ce connard m'avait foutu la trouille quand j'étais
môme. Et dire qu'au final je me suis dit que c'était un pervers. Et j'en
suis sûr : s'en était un !
Sont-ce de vrais souvenirs, Alain ?
RépondreSupprimerJ'ai du mal à t'imaginer en très mauvais élève !
(mais pas trop de mal à imaginer un instit cruel,
on en a tous connu au moins un)
Des souvenirs avec un fondement de vérité. Mais j'ai forcé le trait. L'instituteur que j'évoque a existé et ma rencontre adulte et réelle. Quant à mes résultats le factuel établi par des documents d'époque ne fait pas de moi un aussi mauvais élève que dans mes souvenirs. J'ai même eu un prix de grammaire et d'expression écrite. Qui plus est je fus inscrit au tableau d'honneur. Mais il était écrit dans ma tête : « tu es un bond à rien » (propos récurrents de ma mère).
SupprimerCe qui a tout changé c'est quand j'ai eu la polio à 12 ans, qui me paralysa entièrement. Je suis devenu « un gosse très courageux », répétait alors ma mère,… comme quoi… les épreuves…
les instits cruels ont existé. Investi de leur pouvoir il maltraitait qui leur était inférieur (selon leurs critères); Et si je te disait qu'en plus de la règle sous les genoux certains (et chez les curés) devaient tenir paumes ouvertes un dictionnaire dans chaque main;
RépondreSupprimerCela dit la comtesse de Ségur présenté comme le must du must était une petite tortionnaire mais elle même torturée dans son enfance. Moi je préfère Cadichon. Quant au bonnet d'âne c'est une déviance car au départ l'âne est une animal très intelligent et le bonnet n'était que symbole du bon élève.
Allez Alain c'est dur ces souvenirs mais ils sont loin et tu as fait ton chemin.
Avec le sourire
Bien sûr, je sais depuis que la comtesse n'en était pas une… et que l'histoire de Cadichon évoque tout autre chose. Alors depuis j'ai revisité mes souvenirs comme je l'évoque ci-dessus avec La Licorne. N'empêche, ça laisse des traces…
Supprimeroui je sais il y a des fôtes mais tant pis tu me les pardonneras.
RépondreSupprimerBien sûr je pardonne d'autant plus que je ne les vois pas… pas plus que les miennes d'ailleurs ! :-)
SupprimerOui, c'est vrai, Lilou...
RépondreSupprimerLa Comtesse de Ségur avait été élevée "à la dure", "à la russe"...dans un environnement éducatif assez maltraitant. Et tous ses livres s'en ressentent.
Il y a beaucoup de violence et de cruauté dans ses histoires.
Mais, au moins avait-elle le mérite de décrire les choses telles qu'elles sont, et de ne pas les édulcorer, sous prétexte qu'elle écrivait pour des enfants. On peut lui concéder cela.
La première chose pour guérir des "mauvais traitements", c'est de les reconnaître. Enfin, il me semble.
J'adhère à ta dernière phrase. J'ajoute que reconnaître les mauvais traitements qu'on a pu soi-même infliger à d'autres et tout aussi indispensables, au moins d'en prendre conscience sans culpabiliser a posteriori, ce qui n'est déjà pas une mince affaire…
SupprimerMoi, mon instituteur n'était pas un âne mais un magicien. Je le revois dans sa blouse grise. Le lunid c'était jour de dictée. Tout le monde était terrorisé. Un silence de plomb régnait dans la classe. Monsieur Le brun, l'insituteur s'appelait monsieur Le brun, ramassait les copies et s'installait derrière son bureau. Il posait le tas des copies devant lui et prenait un stylo à plume et nous disait"Je lâche le stylo au dessus des copies et il va venir se poser là où il y a une faute d'orthographe !"......Et il y avait une faute d'orthographe !!
RépondreSupprimerJe comprends qu'il t'ait marqué !
SupprimerCeci dit, aujourd'hui, je pourrais faire ça sans problème : je peux pointer n'importe quelle copie, n'importe où...et trouver une faute d'orthographe ! :-)))
(les enseignants comprendront)
Ton texte me fait penser à "La Mule du pape" d'Alphonse Daudet. Si je me souviens bien, c'est de là que vient le fameux "coup de pied de l'âne" ! ;-)
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