samedi 15 février 2020

JEU 54 : L'étrangère






Etrange...
Je me sens observée !
Comme si l'on m'épiait...
Regard dans mon dos ?
Non ! 
Il n'y a personne...

Bizarre...
Sur mon passage,
les gens s'écartent...
ils désertent les trottoirs...
La ville se vide petit à petit...
Les magasins se ferment
Les vitrines s'éteignent...

En trente secondes,
me voilà égarée dans la pénombre.
Complètement isolée.

Malaise.
Le phénomène, dans sa rapidité,
n'est pas naturel :
manifestement,
il est dirigé contre moi...
On cherche à me mettre de côté.
On me traite en paria,
en indésirable.

Mais la raison
de cet ostracisme inopiné
m'échappe.

Je cherche dans ma mémoire.
Rien ne vient.
Honnêtement, 
je n'ai rien fait de spécial...
Ni hier,
Ni avant-hier,
ni avant-avant-hier.
Vie ordinaire, banale...
sans le moindre incident notable.

Mystère.
La pénible sensation de rejet
s'intensifie.
Elle m'envahit,
me serre la gorge.
Le silence des environs
devient pesant.
Massif. 
Enorme.

Etrangère dans ma ville.
Etrangère chez moi.
Comment est-ce possible ?

Un policier passe.
Me demande mes papiers.
Je tends ma carte d'identité :
il me toise, grimace 
et finit par lâcher, 
légèrement méprisant :
"Il est interdit de rester ici. 
Partez !"

Il insiste.
"Allez, partez ! Vite !"

J'hésite.... 
il sort son arme.
Je n'ai pas le choix  :
j'obtempère.
 
Ok, je m'en vais.
Je rentre à la maison.
Pas envie d'être la cible
de ce cinglé.




Il me crie encore :
"Ce sont les consignes !!!"

Les consignes ?
Je ne comprends pas.

C'est kafkaïen.

Traquée, moi ?
Cela n'a pas de sens.
Mon innocence est évidente.
Flagrante.
Et cependant, la ville entière
semble dressée contre moi.

On cherche clairement 
à me rayer de la carte.
A me faire disparaître...

C'est insensé.

Je vais rentrer chez moi,
y réfléchir à tête reposée. 
Mais soyez-en certains :
je ne me laisserai pas faire.

J'en appellerai à mes amies...
à mes cinq amies proches.
Elles me prêteront main forte...
Elles l'ont déjà fait par le passé...

 Passants et policiers,
écrivants et écrivantes,
sachez-le :
je reviendrai bientôt !
Très bientôt.

Moi, 5ème voyelle et 21ème lettre,
citoyenne de la ville Alphabet,
 je n'ai pas dit mon dernier mot ! 
.

La Licorne



.




6 commentaires:

  1. Un tantinet paranoïaque notre étrangère ! La ch...te est très bien amenée !

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    1. Merci !
      J'ai réécrit la fin deux ou trois fois...
      (pas facile de créer un suspense quand on a des contraintes...serrées)
      Mais qui donc a donné les consignes ?
      Qu'on me l'amène !!! ;-)

      Et oui, certes...elle est légèrement paranoïaque, la miss...
      Mais quand la paranoïa est justifiée...peut-on encore parler de paranoïa ?
      La question est posée... :-)

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  2. Waouh, je ne l'ai pas vu venir cette étrangère-là ! La montée crescendo de la peur est bien amené et le tout joliment tourné ! Grand bravo La Licorne.

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    1. Merci !
      J'ai beaucoup aimé ton texte aussi...

      J'aime que les consignes inspirent des styles différents...et que chacun(e) puisse exprimer ce qui lui tient à coeur...

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  3. je viens de rentrer et je suis déconnectée, je ne trouve pas la consigne. Peux-tu me la donner bises

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    1. Bien sûr, Lilou...

      Alors, la consigne pour ce mois, c'était d'écrire un texte lipogramme, en n'utilisant pas la lettre U et avec un titre imposé à choisir dans la liste suivante :

      "L'idiot"
      "L'étranger"
      "Essais"
      "La métamorphose"
      "Le vieil homme et la mer"
      "Les misérables"
      "Les grandes espérances"

      Voilà, voilà...
      En espérant que ça t'inspire...

      Bises.

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