Pour l'atelier "Mil et une"
Il a levé les yeux vers le ciel, Marcel...
et il a vu le nuage.
Un gros nuage noir et imposant qui n'en finissait plus de s'enfler
et qui recouvrait peu à peu, de son ombre grandissante,
toutes les rues, toute la ville...
Il est resté longtemps derrière sa fenêtre à observer, Marcel.
Et à force d'attention, il a remarqué une chose :
c'est que chaque personne, dans la rue, envoyait,
sans s'en rendre compte,
une petite goutte grise dans les airs.
Toutes ces petites gouttes grises montaient, montaient...
et finissaient par s'agglomérer là-haut,
en une masse compacte et menaçante.
Il a encore regardé, Marcel.
Il a regardé les visages, les attitudes des passants...
Et il a compris que les petites gouttes étaient
des gouttes de tristesse, d'amertume,
de stress et de colère...
Il a compris que c'étaient
les émotions négatives des gens
qui alimentaient le nuage
et qui lui donnaient de plus en plus d'ampleur,
de plus en plus de force.
Il a compris que si l'on ne faisait rien,
le nuage finirait par éclater
et par répandre une pluie méchante
sur toutes les têtes...sur toutes les vies.
Une pluie de malheur.
Alors, il a mis son béret, Marcel.
Il a mis son béret et il a pris son accordéon.
Muni de son béret et de son accordéon,
il est descendu dans la rue,
et il a joué...
Longtemps.
Longtemps.
Toute la journée.
Il a joué tous les morceaux de sa jeunesse,
tous les morceaux qui lui venaient,
toutes les musiques de son coeur.
Trenet surtout,
parce que c'est le plus joyeux.
Au début, il a joué seul...
et puis un enfant s'est arrêté...
Puis une dame et une autre encore.
Pour écouter.
Petit à petit, les notes ont envahi la rue.
Elles se sont posées un peu partout...
Sur les trottoirs, sur les toits, sur les devantures...
Elles ont commencé à danser dans les têtes
à faire fleurir des sourires...
Et petit à petit, au fil des heures,
il a vu les gouttes changer de couleur...
elles ont rosi...elles se sont fait plus légères...
Un rai de lumière a filtré au travers du nuage...
Les gens l'ont vu
et ont souri de plus belle...
A la fin de la journée,
la ville était comme transformée.
Libérée.
Le soleil était revenu.
Alors, il a joué un dernier morceau, Marcel.
Son préféré, qu'il avait gardé pour la fin.
A ce moment-là,
il a vu une colombe descendre du ciel.
Tout doucement, elle s'est posée sur son béret...
Mais il continué,
comme si de rien n'était...
Et puis trois autres colombes sont arrivées.
Du bout de leurs pattes, du bout de leurs ailes,
elles ont fait tinter les clochettes.
Il les a reconnues, Marcel.
Il les a reconnues.
C'étaient les clochettes de la paix.
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La Licorne
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